Mon grand-père, André Julien Marie CATHO, est né
avec le siècle, le 2 janvier 1900, à Rennes (Ille et Vilaine), de père inconnu, ainsi
que son frère Georges, cinq ans plus tard.
Ce n'est qu'en 1968, trois semaines avant son décès, qu'il a donné à
sa fille (ma mère) certains éléments.
Originaire de Vannes, sa mère, Jeanne Marie CATHO, avait eu ses deux
garçons avec le même homme, un entrepreneur en maçonnerie du
Morbihan.
Jeanne Marie CATHO à 22 ans en 1894 |
Faute de nom ou d'autres informations, je m'étais
résignée à laisser vierge un quart de mon arbre généalogique.
Et puis, en lisant des articles de généalogie à
droite et à gauche, j'ai appris que fouiller du côté des témoins
de l'acte de naissance pouvait donner une piste.
J'ai donc repris l'acte de naissance de mon
grand-père André Julien Marie CATHO, et je me suis aperçue que le
premier témoin s'appelait Julien GUEHO (tiens, le même prénom que
mon grand-père), qu'il était domicilié 9 rue de Brest, comme la
mère de l'enfant (une rapide recherche m'apprend que c'est un
immeuble, donc il pouvait simplement s'agir d'un voisin compatissant
...ou plus !), et surtout, qu'il était maçon !
Pas de certitude absolue, mais beaucoup de points
communs tout de même ...
La rue de Brest, à Rennes, vers 1900 |
De plus, en cherchant du côté de Jeanne Marie
CATHO, je trouve l'acte de mariage de son frère à elle, à Vannes
en 1893, et devinez qui est témoin ? Le même Julien GUEHO ! L'âge
correspond, il est entrepreneur ...
J'échafaude aussitôt des hypothèses romanesques :
le témoin et la soeur du marié se plaisent, il a 36 ans, elle en a
21, après quelques années à lutter contre leur attirance mutuelle, ils ont fui à Rennes cacher leur liaison ... Etait-il marié ?
L'Hôtel de Ville de Vannes vers 1893 |
Me voilà donc partie sur les traces de tous les
Julien GUEHO du Morbihan, nés vers 1857, et ils sont
nombreux ... Mais un seul est maçon : celui né à Sérent le 15
février 1857, et marié le 22 juin 1881 à Vannes avec
Marie-Françoise PEDRON.
Je sais donc qu'il était marié depuis presque
vingt ans quand mon grand-père est né, ce qui
explique qu'il ne l'ait pas reconnu.
Désireuse d'en apprendre plus, je pense trouver la
fiche matricule de Julien GUEHO en un rien de temps, sauf que …
même en élargissant un peu les dates, pas de trace de mon Julien
GUEHO dans les registres matricules du Morbihan, pas plus que dans
ceux du Finistère, des Côtes d'Armor, de l'Ille et Vilaine, de la Loire-Atlantique, de Paris ...
Julien étant maçon, peut-être a-t-il dû
effectuer un Tour de France pour apprendre son métier, auquel cas, à
ses vingt ans, il a pu être recensé dans n'importe quel département
français …
En parallèle, je renoue avec une petite-fille de
Georges CATHO, l'autre fils de Julien GUEHO ; ma cousine
Patricia possède d'autres détails sur cette liaison, les
voici :
Le couple Julien et Jeanne Marie est parti
s'installer à Rennes quand Jeanne Marie s'est aperçue qu'elle était
enceinte, donc au cours de l'année 1899. Ils se sont séparés
après la naissance de Georges, lequel n'avait pas de souvenirs de
son père. En revanche, mon grand-père André s'en souvenait ;
c'est d'ailleurs pourquoi, quand sa mère s'est mariée avec un autre
homme, il a refusé d'être reconnu par celui-ci.
Quelque temps après la séparation, Jeanne Marie
est tombée sérieusement malade, et a dû être hospitalisée. Alors, Julien est revenu chercher ses fils et les a emmenés
dans le Morbihan, pour que sa femme
légitime, avec laquelle il n'avait pas pu avoir de descendance, s'en occupe.
Redoutant de perdre ses enfants, Jeanne Marie, bien qu'encore souffrante, quitte
précipitamment l'hôpital, prend un train pour le Morbihan et
va récupérer André et Georges au foyer de son amant et de la femme
de celui-ci …
La gare de Vannes vers 1900 |
Après cet épisode pénible, il semble
bien que les enfants n'aient plus revu leur père.
Jeanne Marie se marie d'ailleurs en 1909, avec
Jean-Marie LE BOUX, lui-même enfant naturel, dont je vous reparlerai
dans « Le mystérieux Monsieur LE BOUX ».
Que deviennent Julien et sa femme, la conciliante
Marie-Françoise ? A ce jour, je n'ai pas retrouvé le décès
de Marie-Françoise, mais voici la triste fin de Julien GUEHO en
juillet 1919 à Muzillac :
Le visage de l'insaisissable Julien GUEHO sera-t-il
un jour connu de ses descendants ? Peut-être, mais le chemin
sera tortueux.
Il me faut pour cela le retrouver dans les
recensements de Vannes et de Rennes, ainsi que dans les autres
communes où il a pu travailler et qui me sont inconnues pour le
moment. Je connaîtrai ainsi ses employeurs de la période où il
était salarié comme maçon.
Sachant qu'il était habituel à l'époque que les
patrons se fassent photographier devant leur entreprise avec leurs
employés au grand complet, il est possible que je mette la main sur
une photo où figure mon arrière-grand-père.
D'ailleurs, son beau-père Jean-Marie PEDRON étant
maçon dans le quartier de Bohalgo à Vannes, il est très possible
que Julien ait travaillé avec lui.
Parallèlement, je vais chercher les descendants de
la sœur de Julien, Michelle GUEHO, et les descendants du frère et
de la sœur de Marie-Françoise, Joachim PEDRON et Jeanne PEDRON
épouse LE FILLEUL.
Peut-être ceux-ci ont-ils conservé des photos de
groupe où serait présent Julien GUEHO ? Il faut savoir que le
dit Julien avait une véritable vocation de témoin ! Il figure
en tant que tel sur nombre d'actes de naissance, mariage et décès
de son entourage familial et de celui de sa femme.
Ce fait vient nuancer et enrichir le portrait moral de Julien : être choisi aussi souvent comme témoin par des
personnes différentes accrédite l'idée d'un homme fiable,
sympathique et disponible.
Si j'arrive à obtenir plusieurs photos, je pourrai
peut-être identifier Julien par recoupements, éventuellement aidée
de la description physique présente sur sa fiche matricule que je
continue à chercher dans d'autres départements.
Cerise sur le gâteau quelques mois après avoir fait toutes ces découvertes : via un test ADN, j'ai remonté l'ascendance d'un cousin génétique apparaissant dans mes correspondances, et ... ses ancêtres sont les mêmes que ceux de Julien GUEHO ! CQFD ...
En conclusion, il ne faut jamais désespérer,
surtout en généalogie. Dans certaines situations, un père inconnu
peut être identifié, il suffit d'avoir un premier fil à tirer pour
dévider une bonne partie de la pelote. Si un tel cas se présente à
vous : interrogez, prenez conseil, réfléchissez, écumez les
archives …
J'en profite d'ailleurs pour remercier à nouveau
tous ceux qui m'ont aidée dans cette quête, et tous ceux qui
m'aideront encore. D'ailleurs, si vous avez une suggestion de
nouvelles pistes de recherches, faites m'en part, un œil neuf est
souvent plus affûté !