dimanche 4 août 2019

Mathilde et Léonie


Nous sommes le 17 mars 1872, au Château de Neubourg, à Saint Marcouf, dans le Calvados. Il est quatre heures du matin.
La baronne de BILLEHEUST d'ARGENTON, née Eugénie de LA POIX DE FREMINVILLE, vient, en dépit de ses quarante-sept ans, de mettre au monde son quatrième enfant, Marie Louise Joséphine Mathilde de BILLEHEUST d'ARGENTON.
La petite Mathilde, lavée, nourrie, s'est endormie profondément dans un confortable berceau, soigneusement blottie sous les dentelles et les linges fins.
 
L'entrée du Château de Neubourg, à Saint Marcouf  (Calvados)



A 700 kilomètres de là, au n°46 de la rue de l'Embergue, à Rodez, préfecture de l'Aveyron, la petite Léonie FRAUDET, qui fêtera bientôt ses trois ans, dort également à poings fermés. Sa mère, Rose GUITARD, n'a pas d'autre choix que de les faire coucher, elle et sa grande sœur Victorine, dans le même lit, sous de grossières couvertures de laine. Rose et son mari, Hippolyte FRAUDET, manœuvre, dorment encore, dans l'unique pièce qui compose le logement. Il leur faudra bientôt se lever, pour gagner péniblement leur pain de chaque jour.

46 rue de l'Embergue à Rodez









Les vies de Mathilde et de Léonie sont toutes tracées, chacune dans son milieu social et son environnement géographique ; aucune chance pour elles de se croiser un jour, et pourtant … trente ans plus tard, Léonie sera la légataire universelle de Mathilde et héritera de la moitié de la fortune des BILLEHEUST d'ARGENTON, soit plus de 200 000 francs-or (environ deux millions d'euros) !


Comment cela a-t-il pu se produire ? 


Avant de commencer cet étonnant récit, je tiens à renouveler ici mes plus vifs remerciements à l'endroit de M.BONNARD, qui nous a révélé l'histoire de Léonie FRAUDET, l'arrière-grand-mère de mon mari, sur laquelle nous n'avions que très peu d'éléments.


Transportons-nous en 1891, Léonie FRAUDET a vingt-deux ans et vient de devenir mère à son tour. Elle a mis au monde le 10 janvier une petite Gabrielle (future grand-mère de mon mari). L'identité du père de l'enfant est inconnue, probablement un militaire, mais sans certitude.
Léonie est couturière de profession, spécialisée dans la culotterie, c'est-à-dire les pantalons masculins.

Léonie FRAUDET vers 1920 (nous n'avons malheureusement pas de photo plus ancienne)



Quant à Mathilde, depuis qu'elle a perdu son père à l'âge de neuf ans, elle vit une adolescence et une jeunesse très libres pour son milieu social et son époque. Il sera reproché plus tard à sa mère de ne pas avoir pris les mesures nécessaires (le mariage ou le couvent) pour cadrer cette impétueuse jeune fille qui ne rêve que de grand air, de chasse, de chiens, de chevaux … et d'amour ! 

 
Mathilde, vers 1897



En effet, livrée à elle-même, son tempérament fougueux a pris le dessus sur la bienséance, et Mathilde se retrouve, à vingt ans, enceinte des œuvres du cocher …
Sa mère, la baronne, est catastrophée par cette nouvelle. Etre fille-mère, dans l'aristocratie, fût-elle de province, est un scandale absolu et ne manquera pas d'entraîner la mort sociale, non seulement de Mathilde, mais de toute sa famille.
La baronne Eugénie est âgée de 68 ans, son mari et son seul fils sont décédés, elle vit isolée avec ses filles Mathilde et Emilie, laquelle a alors 26 ans et un naturel infiniment plus paisible que celui de sa soeur. Seul le frère d'Eugénie, Jules de la POIX de FREMINVILLE, est mis dans la confidence et, bien que résidant à l'autre bout de la France, se montrera un soutien actif et dévoué au cours des événements qui vont suivre. 


C'est d'ailleurs la correspondance abondante entre les BILLEHEUST d'ARGENTON et les LA POIX de FREMINVILLE qui nous permet de connaître cette histoire exceptionnelle. Ces lettres ont été publiées en 1982, sous le titre « Marthe », éditions du Seuil, collection "Libre à elles" , par Bernard de LA POIX de FREMINVILLE, que je remercie également pour avoir volontiers répondu à mes sollicitations. 
Ce livre a d'ailleurs été présenté au cours de l'émission « Apostrophes » dont voici un extrait (à partir de 2:23) :











A noter que dans le livre, les noms propres ont été modifiés (Mathilde en Marthe, et Léonie en Louise).

Nous apprenons ainsi que la baronne Eugénie prend la décision qui lui apparaît la seule possible, celle de cacher, coûte que coûte, la grossesse de sa fille. Pour cela, les trois femmes quittent précipitamment leur château de Normandie et s'installent à Paris, Eugénie et Emilie dans un petit appartement, et Mathilde, dans une pension réservée aux jeunes filles dans la même situation qu'elle.
Le 14 février 1893, Mathilde donne le jour à un petit Georges. Toujours pour préserver la famille du scandale, l'enfant est dit « de père et mère non dénommés ». Ce bébé ne sera cependant pas abandonné, comme tant d'autres l'ont été. La baronne s'est échinée à lui trouver une nourrice, sérieuse et en bonne santé, et surtout habitant loin, de façon à ce que nul ne fasse de rapprochement entre Mathilde et le petit.
Parallèlement, et toujours dans le souci de garantir l'avenir de sa fille, la baronne tente désespérément de lui trouver un mari qui ne soit pas trop regardant sur son passé, tout en étant de bonne famille et de fortune équivalente. Autant dire que ces critères sont, à l'époque, plutôt incompatibles.
Un certain Eugène FANTON d'ANDON est finalement agréé, lequel, au prix de conditions financières avantageuses pour lui, consent également à reconnaître le petit Georges, le 27 juin 1895. Mathilde reconnaît également son fils le même jour. Georges a donc désormais un père et une mère officiels, mais la famille BILLEHEUST d'ARGENTON estime préférable qu'il reste en nourrice.

Le mariage a lieu le 17 juillet 1895 à Andon (Alpes-Maritimes), sans qu'aucun membre de la famille de Mathilde ne soit présent, pas même sa mère, pour des soucis de convenances.
Au début de son mariage, Mathilde vit à Biot (Alpes-Maritimes), résidence d'hiver de la famille FANTON d'ANDON, dans une grande et vieille bâtisse de la rue du Mitan. Puis sa mère lui donne de quoi construire le chalet "Mathilde", toujours à Biot, chemin des Pins.



La famille FANTON d'ANDON, Mathilde et Eugène sont debout à gauche. La petite fille à droite est Simone de MAUPASSANT, nièce de l'écrivain.

Revenons à Léonie : elle a laissé sa petite Gabrielle à Rodez, aux bons soins de sa propre mère, Rose, et travaille à Montpellier. C'est là que le 14 septembre 1894, Léonie épouse François GARROUSTET, employé de commerce, un veuf de vingt-sept ans son aîné. A cinquante-deux ans, peu reconnaissant qu'une jeune femme de vingt-cinq ans se soit éprise de lui, François GARROUSTET reste un coureur de jupons sans scrupules.
Il ne tardera d'ailleurs pas à l'abandonner, fin 1897, après lui avoir fait un garçon, Charles, né le 14 août 1895 à Montpellier.

Quant au couple de Mathilde, il ne se porte guère mieux. Les relations entre les jeunes époux sont houleuses dès le départ, en raison des forts caractères de chacun et de l'immixtion des deux belles-familles dans la vie des jeunes gens. De plus, ni Eugène, ni Mathilde, ne sont irréprochables sur le plan de la fidélité conjugale, Mathilde continuant à se livrer à des amours ancillaires, avec notamment un certain Victorin.
Le sort du petit Georges est également un sujet de conflit, Eugène voulant qu'il s'installe avec eux pour l'élever à sa manière, et Mathilde craignant l'influence néfaste de celui-ci.

Bref, après bien des scènes, suivies de brèves réconciliations, Mathilde finit par s'enfuir littéralement de chez son mari en août 1898, et par rejoindre sa mère et sa sœur à Montpellier.

Les deux femmes s'y sont installées en 1897, route de Castelnau, ont récupéré le petit Georges âgé de quatre ans, et en juin 1898, ont embauché une bonne qui n'est autre que … Léonie FRAUDET. Voici ce que la baronne en dit dans une lettre à son frère, en date du 29 juin 1898 : « Notre bonne semble devoir nous convenir, nous la payons trente francs par mois, ce qui fait trois cent soixante francs. Mais comme elle a deux enfants et une vieille mère et qu'elle a été obligée de laisser son mari qui s'est acoquiné avec une autre femme et qu'il lui fallait néanmoins porter toute la charge du ménage, nous serons obligées par notre coeur charitable à lui donner souvent. »


Enclos Laffoux, route de Castelnau à Montpellier
En septembre 1898, le petit Georges tombe gravement malade, atteint de la dysenterie. Il en décède le 20 septembre. Sa tante Emilie, qui n'a pas ménagé ses efforts pour soigner l'enfant auquel elle est très attachée, déclare la maladie à son tour, et affaiblie par le chagrin, décède le 7 octobre.

La baronne contracte également la dysenterie, aggravée de problèmes respiratoires. Le déchirement causé par la perte de sa fille aînée, qui fût son fidèle soutien, et les tourments causés par la situation de Mathilde, font craindre pour la vie de cette femme de soixante-quatorze ans.

Mathilde écrit à son cousin Joseph le 23 novembre 1898 : « Que je suis malheureuse de tout ceci, heureusement j'ai Léonie qui m'est d'un grand secours dans cette maladie car elle aide avec tout son dévouement et il lui faut encore me soigner par-dessus le marché. Va, elle est bien précieuse. »
La baronne décède le 1er décembre 1898. Il ne reste à Mathilde que des cousins qui ne tiennent guère à s'embarrasser d'elle, et Léonie, qui n'est attachée au service des BILLEHEUST d'ARGENTON que depuis six mois, mais qui a su se rendre indispensable.

Dès la fin de ce même mois, Mathilde s'installe à Rodez, provisoirement, puis définitivement, afin que Léonie, « son hérisson », comme elle l'appelle affectueusement, soit près de sa mère malade.

L'oncle de Mathilde voit avec bonheur l'influence de Léonie : « Léonie est son tout, son appui, son conseil de chaque jour, son aide, sa compagnie, son soutien moral. C'est heureux, j'en suis convaincu. »

Le divorce entre Mathilde et Eugène est prononcé au printemps 1899, aux torts de l'époux et, là aussi, l'accommodement a été monnayé afin que la réputation de Mathilde ne soit pas abîmée plus que ce qu'elle est déjà, car les rumeurs et sous-entendus vont bon train dans le cercle social auquel appartiennent les BILLEHEUST d'ARGENTON.

Cet épisode malheureux n'a pas dégoûté Mathilde des liens du mariage, et ne lui a pas davantage remis les pieds sur terre : elle n'hésitera pas, quelque temps plus tard, à demander à son oncle de lui trouver un beau parti dans la bonne société de Saint-Etienne. Or, malgré tous les efforts qu'ont consentis sa mère et son oncle, la situation de Mathilde, fille-mère et divorcée, est désastreuse. Son oncle sera obligé de lui expliquer, avec toute la délicatesse nécessaire, qu'elle ne pourra plus jamais être acceptée dans la bonne société ...

Mathilde se construit donc une nouvelle vie à Rodez ; elle emménage dans le quartier du Monastère, d'où Léonie écrit au cousin Joseph le 5 avril 1899 : « Elle (Mathilde) est à peu près tranquille, s'occupant avec moi dans la maison, nous promenant, causant ensemble, enfin une vie qui sera, je l'espère, très bien si cela continue toujours comme maintenant. Elle se trouve très bien ici, le temps est splendide et si sa santé pouvait devenir un peu meilleure, je crois que tout irait pour le mieux. »

Les deux femmes voyagent, pour une cure au Mont Dore en juillet 1899, suite à des crachements de sang de Mathilde, en Belgique et à Paris en 1900 pour l'Exposition Universelle.




Exposition Universelle de 1900
Paris, Exposition Universelle de 1900
Au printemps 1900, Mathilde acquiert une grande maison au 8 avenue Durand de Gros à Rodez. Le cocher et jardinier est Amans LAGARDE, qui a épousé la sœur de Léonie, Victorine. Le reste du personnel est composé d'une cuisinière, Pauline SOUVRIER, et de deux femmes de charge à la journée.
Y vit également une petite Maria, âgée de sept ans, fille d'une cousine germaine de Léonie.

Le 15 décembre 1900, Mathilde écrit à son cousin Joseph : « Léonie est tout à la fois une sœur et une mère, moi qui n'ai plus personne qui me touche de bien près, plus de foyer, je me sens toute réconfortée par sa tendresse et son indulgente bonté, moi qui suis loin d'être pieuse, je remercie Dieu de m'avoir donné un tel appui ».

La petite Gabrielle, fille aînée de Léonie, et grand-mère de mon mari, a maintenant dix ans. Elle vit elle aussi au contact de Mathilde qui mentionne dans une lettre à Joseph sa première communion le 9 juin 1901.

Le 11 mai 1902, Mathilde ressent les premières atteintes de la maladie qui lui sera fatale, probablement une bronchite, prise au sortir d'un banquet socialiste qu'elle aurait présidé (ce détail n'étant pas fait pour rehausser son image auprès de sa famille ...).

Mathilde rend l'âme le dimanche 25 mai 1902, à deux heures du matin. Elle a rédigé son testament deux jours avant sa mort, avec le curé comme témoin.
Elle lègue ainsi ses domaines de Saône-et-Loire, d'une valeur de 200 000 Francs-or environ, à son cousin Joseph de LA POIX de FREMINVILLE. Mais toute la part de fortune qui lui venait de sa famille paternelle et de la vente de ses propriétés normandes, y compris le château, (exactement 200 497,53 Francs-or, soit environ deux millions d'euros aujourd'hui) revient à Léonie.

Léonie hérite donc de très nombreuses actions et obligations, certaines russes, égyptiennes, chinoises, autrichiennes, danoises …

Par ailleurs, outre la maison du 8 avenue Durand de Gros à Rodez, Léonie se retrouve propriétaire d'une maison à Duravel, dans le Lot, la « Villa Paul », que Mathilde avait acquise peu de temps auparavant.

Le reste des domestiques n'est pas oublié : Amans LAGARDE reçoit, outre la voiture et la jument dont il avait la charge, un legs de 10 000 francs.

Une certaine Amélie GARRIGUES,
dont le mari, Jean-Marie SOULA, est employé à la gare de Rodez, âgés de 26 ans tous les deux, et qui habitent 5 rue Durand de Gros, reçoit 5 000 francs. Peut-être appartenait-elle à la famille de Léonie, qui comprend des GARRIGUES, mais je n'en ai pas la certitude.

Certains membres de la famille de Mathilde conçoivent des soupçons de cette mort rapide et de ce testament in extremis, ainsi Amélie de BILLEHEUST d'ARGENTON : « Quant à Léonie, je souhaite que tout ce bien acquis l'ait toujours été loyalement, et qu'elle ait vraiment mérité cette bonne fortune. On voit des choses si horribles qu'on se prendrait volontiers à douter du dévouement et de la fidélité des meilleures domestiques qui ont tout intérêt à voir disparaître leurs maîtresses. »

Même chose de la part de Charlotte de LA POIX de FREMINVILLE : « Je me sens bouillir d'une indignation épouvantable en pensant que cette garce de Léonie a tout pris aux BILLEHEUST d'ARGENTON. Ah, quelle habile femme, comme elle a su bien faire et capter la pauvre Mathilde si faible de caractère, du moins avec cette Léonie qui avait su l'enjôler à fond. Pour les BILLEHEUST d'ARGENTON, c'est tous leurs biens propres qui disparaissent et vont à une domestique dont le dévouement de quatre ans seulement a été bien intéressé, quelle femme adroite ! ... »

Joseph est plus mesuré dans son appréciation : « Mon sentiment, ma conviction est que Léonie n'a pas capté au sens strict du mot, elle a été servie par les circonstances, elle n'a pas envenimé les intentions de Mathilde, mais n'a rien fait non plus pour les ramener. Mathilde a fait son testament en toute liberté et lucidité d'esprit comme le curé d'abord et le notaire ensuite nous l'ont dit. Ah, son affection pour Léonie était profonde, il suffirait pour s'en convaincre de lire les appréciations toutes de tendresse qu'elle écrivait sur le compte de sa chère Léonie ».

Bref, la famille ne contestera pas le testament, et voici Léonie devenue une des femmes les plus riches de Rodez.



Le chagrin de Léonie est vif et elle s'insurge du fait que le décès de Mathilde ne fasse pas l'objet de faire-parts classiques, en raison de son divorce : "Je vois qu'encore après sa mort la pauvre et chère Mme Mathilde n'est pas placée au même rang que les autres membres de la famille et je ne vois pas pourquoi. Est-ce parce que toute sa vie cependant si courte a été pour elle un martyre d'une façon ou d'une autre, on l'avait mariée à un mauvais sujet qui la faisait souffrir de mille manières, il fallut se séparer, est-ce pour cela qu'on doit l'exclure des honneurs qui lui sont dus même après sa mort ? Oui, elle était divorcée, et quoique telle, elle était estimée et aimée de tous ceux qui l'approchaient et aux yeux de Dieu, elle aura été peut-être plus grande que beaucoup de ceux qui ont une religion si hypocrite. Elle était franche, loyale et charitable, qualités qui se rencontrent très rarement. Aussi Monsieur, pour moi simple étrangère qui m'étais attachée à elle, comme elle s'était attachée à moi, je bénirai et respecterai toujours sa mémoire." (Lettre à Jules de LA POIX de FREMINVILLE, datée du 13 juin 1902)


Léonie se rend à Montpellier en octobre, et fait exhumer le petit Georges afin qu'il repose aux côtés de sa mère. Ils sont ainsi tous deux réunis dans un caveau du cimetière de Rodez, dont la concession est au nom d'Amans LAGARDE.
(Faute d'entretien, ce caveau a été repris en 2008 et les corps transférés à l'ossuaire.)


Sur ces entrefaites, François GARROUSTET se décide à réintégrer le domicile conjugal, abandonnant sans vergogne le foyer illégitime pour lequel il avait quitté Léonie cinq ans plus tôt.
Léonie est-elle dupe de ce brusque retour de flamme ? Probablement que non, mais soit elle préfère faire preuve de mansuétude, soit François ne lui en laisse tout simplement pas le choix, et il est dans son droit …
"Je ne crois pas vous avoir dit que mon mari était revenu avec moi, il s'est repenti et j'ai pardonné, la vie est si courte qu'il est inutile de vivre de méchancetés et puis à son âge aujourd'hui, il était malheureux et je l'ai plaint, j'ai tout oublié et j'espère que Dieu nous accordera peut-être encore quelques bons jours car jusqu'ici j'ai été bien malheureuse." (lettre à Joseph de LA POIX DE FREMINVILLE, datée du 3 novembre 1902).
La réconciliation se solde par la naissance d'une petite Georgette Jeanne Mathilde le 3 octobre 1904. On notera que Mathilde n'est pas oubliée dans le choix du prénom de l'enfant, ultime témoignage d'affection de la part de Léonie.

Maintenant, que va faire Léonie de cette fortune tombée du ciel ? Le portefeuille de valeurs est intelligemment constitué, de titres sûrs et diversifiés qui produisent un bon rendement. Les obligations russes ne survivront pas à la révolution de 1917, mais le reste est solide.
Cependant, que ce soit changements hasardeux de placements ou dépenses somptuaires, les 200 000 francs-or ne vont pas durer longtemps. Léonie avait-elle pris des habitudes de luxe au contact de Mathilde ? Novice en matière de gestion financière, a-t-elle dilapidé son bien, croyant qu'il était inépuisable ? D'autre part, les solliciteurs n'ont pas dû manquer, et Léonie n'a peut-être pas eu la force de les repousser tous, surtout s'ils appartenaient à sa nombreuse parenté …
Enfin, l'influence de ce mauvais sujet qu'était François GARROUSTET a certainement joué dans la fonte brutale de la fortune héritée de Mathilde.


En 1912, Léonie marie sa fille Gabrielle, que François GARROUSTET a bien voulu reconnaître quinze jours plus tôt seulement. Le contrat de mariage de Gabrielle n'est pas à la hauteur de ce qu'il devrait être, compte tenu de l'héritage colossal reçu par sa mère dix ans plus tôt ...

En septembre 1915, nouvelle succession de décès dans l'entourage de Léonie : son beau-frère Amans LAGARDE le 12, et François GARROUSTET le 21.

Voilà Léonie seule à la tête d'un patrimoine déjà très largement entamé. Elle ne parviendra pas à le faire durer jusqu'à sa mort. 


Vers 1920, de haut en bas et de gauche à droite : Paul COMBES (mari de Gabrielle), Charles GARROUSTET, Georgette GARROUSTET, Gabrielle GARROUSTET, Henri COMBES (le père de mon mari), et Léonie FRAUDET.


En 1925, Léonie est domiciliée 26 avenue Tarayre à Rodez, chez sa soeur Victorine. Vivent également avec elles deux filles et un petit-fils de Victorine. Des quatre femmes, une seule travaille (une des filles de Victorine est tricoteuse). On peut donc imaginer que ce foyer de cinq personnes vit en grande partie aux frais de Léonie ...

Au recensement de 1931, Léonie ne fait plus partie de ce foyer, mais elle y réapparaît en 1936.

En 1938, Léonie fait un séjour à Paris, là où vit son fils Charles.



Vers la fin des années 40, début des années 50, à bout de ressources, la voilà contrainte de demander asile à sa fille Gabrielle, à Albi.

Il subsiste néanmoins quelques souvenirs de Mathilde, dont ce meuble qui est resté dans la famille :



Léonie décédera le 15 avril 1954, elle est inhumée au Cimetière des Planques, à Albi, dans le caveau familial.


Malgré mes recherches, bien des zones d'ombre subsistent encore dans la vie de Léonie, surtout en ce qui concerne sa jeunesse. En effet, elle semble avoir reçu une instruction relativement poussée pour une femme de son milieu et de son temps.
L'écriture de Léonie est élégante et soignée, surtout si l'on compare à sa soeur Victorine. Si le style de ses lettres peut parfois laisser à désirer, l'orthographe y est parfaite.

Signature de Léonie sur la déclaration de succession de Mathilde

L'histoire est-elle finie ? Non, comme bien souvent, le destin nous réserve encore un dernier clin d'oeil.

Pour en mesurer toute la saveur, il faut savoir que mon mari et moi sommes natifs, lui, d'Occitanie, moi, de Bretagne, et que jamais nous n'aurions pensé qu'il pût y avoir un lien préexistant entre nos deux familles
Or, si mon mari est l'arrière-petit-fils de Léonie, il se trouve que mon arrière-arrière-grand-oncle, Jean-Marie LERAY, dont j'ai parlé ici, avait épousé une certaine Bathilde de VILLIERS, qui n'est rien moins qu'une cousine de Mathilde !
Belle illustration de la théorie des six degrés de séparation ...

mercredi 5 juin 2019

J'ai fait un test ADN généalogique ...

Et voilà, j'ai craqué, je l'ai fait ... Après avoir parcouru moult blogs et forums, bien réfléchi au fait que mon ADN n'allait plus m'appartenir, et en étant parfaitement consciente de commettre un acte illégal, j'ai commandé un kit d'analyse ADN chez MyHeritage !

Entendons-nous bien : je ne fais pas de prosélytisme en faveur de MyHeritage, je ne touche aucune commission, mais, tout simplement, c'est le seul site de ce genre qui soit en français, ce qui simplifie grandement les choses sur un sujet assez technique. De plus, leurs ventes en France sont en train d'exploser, et leur base de données s'enrichit à grands pas.

Ce test comprend deux volets : les origines ethniques et la recherche de cousinages.

Concernant les origines ethniques, les résultats sont à prendre avec précaution, en raison de deux facteurs :
- le peu d'individus français déjà testés
- la position géographique de la France, au carrefour de l'Europe de l'Ouest, ce qui a entraîné une grande diversité de populations sur son territoire. Le patrimoine génétique d'un basque n'est pas le même que celui d'un alsacien, qui lui-même n'a rien à voir avec celui d'un breton ou d'un auvergnat.
Donc, même si vous avez établi par des moyens plus classiques que vos ancêtres sont installés depuis des temps immémoriaux dans le même coin de la Saintonge ou du Morvan, MyHeritage ne vous dira jamais que vous êtes français. Un breton sera considéré comme anglais, un occitan, espagnol, un provençal, italien, etc ...

Pour moi qui suis de l'Ille et Vilaine et du Morbihan depuis au moins aussi longtemps que les archives permettent de remonter, soit le XVIè siècle, voici mes résultats :


Au premier coup d'oeil, il est clair que les trois zones principales se recoupent en un point qui est la Bretagne.
Les résultats plus détaillés donnent :
54.9 % bretonne, irlandaise, écossaise, galloise. MyHeritage commence donc à donner des résultats plus affinés, par province française. Que les bretons soient proches génétiquement des irlandais, écossais et gallois, c'est logique, vu que la Bretagne a toujours plus échangé par mer que par terre. Des allers-retours d'une côte à l'autre se sont effectués depuis les temps préhistoriques, pour le commerce ou pour la guerre.
5.3 % anglaise, même explication.
29.2 %, ouest et nord-européenne. C'est l'apport continental, sachant que mes ancêtres sont aux trois quarts de la région de Rennes, aux portes de la Bretagne.
10.6 % ibère. Le pourcentage d'ibères se retrouve très fréquemment chez les bretons, voici une explication tirée de Wikipédia : " Les Ibères descendent des premiers habitants de l'Europe occidentale et sont les héritiers de la grande culture mégalithique de ces régions. Cette explication s'appuie éventuellement sur des études génétiques. Les Ibères seraient apparentés aux Proto-Celtes du Ier millénaire av. J.-C. qui ont peuplé la France, la Grande-Bretagne et l'Irlande ."

Ces résultats sont donc sans surprise, et parfaitement cohérents avec ce que je sais de mes origines. Me voici donc rassurée sur la fiabilité du test.

Passons au second volet, qui va me demander beaucoup plus de travail de recoupement et de compréhension : les correspondances.
Voilà que j'ai 487 cousins potentiels, surgis d'un peu partout, de France, mais aussi des Etats-Unis, de Grande-Bretagne, du Canada, d'Australie ...


 Logique là aussi, des collatéraux des siècles passés ont dû émigrer vers le Nouveau Monde et y avoir une descendance. Voilà peut-être un moyen de retrouver mon arrière-arrière-arrière-grand-oncle qui quitta son Morbihan natal pour émigrer au Mexique et dont la famille n'eut plus jamais de nouvelles ... Le jour où je verrai un mexicain dans mes correspondances, je lui saute dessus !
 
 Pour exploiter au mieux ces correspondances, il faut classer les résultats par le pourcentage d'ADN partagé, et par le nombre ou la longueur de segments d'ADN.
Huit correspondances sortent du lot, essentiellement des français, mais aussi deux canadiens anglophones de la même famille.
J'envoie donc des messages à tout ce petit monde, via la messagerie interne de MyHeritage, et en anglais pour mes potentiels cousins du Canada.
Le soir même, j'ai déjà deux réponses de correspondants français, celle d'un monsieur également breton avec qui nous convenons de pousser nos recherches plus avant, et celle, enthousiaste, d'une cousine avérée (coucou Marie !) dont je connais la maman dans la vraie vie, et avec qui je partage la même arrière-grand-mère. Notre parenté établie par les actes est bien confirmée par la génétique, je peux donc continuer mes recherches en confiance.
 
Alors, faut-il faire ce test ? Oui, mais ... il faut savoir que le pire et le meilleur peuvent en sortir.
Si par exemple, vous offrez un test à votre papa (MyHeritage fait des promos pour la Fête des Pères, ce qui est d'un goût douteux), et que vous vous apercevez que vous ne partagez aucun ADN avec lui ... vous imaginez ? Le risque est bien présent : 
Mais il existe également de belles histoires :
Néanmoins, nous sommes tous concernés par ce genre de problématique ; les enfants de père inconnu ne sont pas rares au XIXè siècle, j'en ai déjà parlé ici et là. Peut-être pourrai-je ainsi retrouver le père biologique de mon arrière-grand-père ?
Qu'on le sache, et quoi qu'on en pense par ailleurs, ces tests ADN vont bouleverser de nombreuses relations familiales. Nous ne pouvons pas empêcher qu'un frère, une nièce, ou un petit-fils fasse ce test, et nous apprenne ainsi que notre grand-oncle Auguste a semé des enfants un peu partout, que notre tante Léontine a dû abandonner un bébé à la naissance, que notre cousin Victor était de l'Assistance Publique, etc ...

Ceci posé, combien coûte cette expérience ? MyHeritage fait souvent des promotions : avec les frais de port, ce test m'a coûté 68 €. Trois semaines après la commande, j'ai reçu un coffret contenant les explications nécessaires pour activer le kit sur internet, deux petits tubes et deux grands cotons-tiges. On frotte les cotons-tiges à l'intérieur de chaque joue, en ayant pris soin de ne pas avoir mangé, bu, fumé (ou fait un french kiss) dans les heures qui précèdent. On met les bouts de coton-tiges dans les tubes, on glisse les tubes dans l'enveloppe bulle qui est fournie, et on affranchit le tout pour 1€30 à destination de Houston, Texas, avec un petit frisson de crainte complotiste en se demandant si on ne fait pas une bêtise ...
Un mois plus tard environ, un mail m'informe que mes résultats sont disponibles sur le site de MyHeritage. Ces résultats sont enrichis quotidiennement de nouvelles correspondances, je n'en suis donc qu'au tout début de mes découvertes.

Par la suite, il est possible de dresser de savants tableaux pour comparer les segments d'ADN partagés, de télécharger ses résultats sur d'autres sites en anglais pour trouver de nouvelles correspondances, d'effectuer d'autres tests plus coûteux pour déterminer de quel groupe de chasseurs-cueilleurs du Néolithique on descend, etc ...
Je n'en suis pas encore là, le champ des possibles est immense, et je ne manquerai pas de vous tenir au courant des résultats.




dimanche 31 mars 2019

Le mystérieux Monsieur LE BOUX - Histoire d'une rédemption

Mon arrière-grand-mère, Jeanne Marie CATHO, a épousé le 16 juin 1909, à Rennes, un certain Jean-Marie LE BOUX.
Jeanne Marie est déjà mère de deux garçons, André, 9 ans, et Georges, 4 ans, de père officiellement inconnu (cf Julien GUEHO, le père inconnu , à lire auparavant pour une meilleure compréhension de ce qui va suivre).
Voici la photo de Jeanne-Marie CATHO et de Jean-Marie LE BOUX, très probablement prise le jour de leur mariage :

Jean-Marie LE BOUX exerce la profession de tailleur de pierres, je n'ose dire de menhirs, au vu d'une certaine ressemblance avec Obélix …
Lui-même né de père inconnu, le 11 avril 1862, au village de La Grée aux Moines, à Lizio (Morbihan), Jean-Marie ne voit aucun obstacle à prendre sous son aile André et Georges. Il propose même de reconnaître le petit Georges, celui-ci n'ayant que de très vagues réminiscences de son père naturel. Jeanne-Marie décline cette proposition, tenant à ce que les deux frères aient le même statut.
Ceci étant, Monsieur LE BOUX laissera un très bon souvenir aux deux garçons, se montrant un père de remplacement affectueux et attentif, les poussant à étudier et à s'élever socialement. Ses vœux seront comblés, puisque mon grand-père André sera clerc de notaire, puis agent immobilier à son compte ; quant à Georges, il intégrera HEC et fera une belle carrière de comptable.
Beau parcours, pour ces deux enfants de père inconnu et d'une modeste lingère !
Jean-Marie et Jeanne-Marie auront la joie d'avoir une fille, Jeanne, née le 12 août 1910.

Ce bonheur sera de courte durée, puisque Jean-Marie connaîtra une fin prématurée le 21 novembre 1914, à l'âge de 52 ans. Il décède à son domicile, suite à un accident, selon la mémoire familiale, mais sans autres précisions. Le lieu de son inhumation est également inconnu.
Sa veuve, Jeanne-Marie, alors âgée de 42 ans, ne se remariera pas, mais se montrera peu diserte par la suite sur son défunt époux. Elle conservera son portrait dans son appartement jusqu'à son propre décès en 1946, sans répondre autre chose aux questions de ma mère, alors enfant, que : « C'est mon mari ».
Ma mère pressentira toujours un mystère relatif à cet homme qui n'a, après tout, passé que cinq ans dans notre famille. Quelle fût sa vie auparavant ?

C'est dans l'optique de résoudre cette énigme que je suis allée consulter la fiche matricule de Jean-Marie. Stupeur ! Les mots suivants me sautent aux yeux : « Cour d'Assises … condamné à dix ans de prison … Maison Centrale … ».
Il y avait donc bien un secret, et de taille ! S'ensuit alors une période de recherches fiévreuses dans les archives judiciaires, pour lesquelles je remercie vivement Maguy, de l'Entraide Généalogique d'Ille et Vilaine.
Voici donc le parcours de vie de Jean-Marie LE BOUX (orthographié parfois LE BOUT), tel que j'ai pu le reconstituer.

De son enfance, je n'en sais guère. Sa mère, Guillemette LE BOUX avait 42 ans lorsqu'elle l'a mis au monde. Elle était veuve depuis sept ans et élevait seule ses cinq enfants. Il n'a pas dû être facile pour le jeune Jean-Marie de grandir sans père dans un petit village. Sans doute a-t-il dû se défendre plus d'une fois contre les moqueries de ses camarades, ce qui a trempé son caractère.
Sa mère décède en 1886, alors qu'il a 24 ans.
En 1887, Jean-Marie est domicilié à Ploërmel. Il est dit grand et fort gaillard d'1m70, travailleur mais bagarreur. D'ailleurs, le 9 mai 1887, dans le chantier où il travaille tranquillement, un autre ouvrier lui fait des remarques qualifiées de peu séantes. Voici un extrait du jugement du 1887 : "LE BOUX s'étant emporté, lui a donné un coup de poing. (Ils) se sont alors jetés l'un sur l'autre et fait des blessures. Attendu que CHOULEUR (l'autre ouvrier) ait été le plus blessé des deux, il y a lieu néanmoins de lui appliquer une peine plus légère que celle à infliger à LE BOUX, que celui-ci a eu en effet le tort de  céder trop promptement à un premier sentiment de colère, on doit lui tenir compte de ce que, en définitive, il a été en quelque sorte provoqué par l'impertinence de CHOULEUR. Par ces motifs, condamne CHOULEUR à vingt-cinq francs d'amende et LE BOUX à cinq francs d'amende." 
 
METIERs - ARTISANAT - Tailleur De Pierres - Artisanat
Tailleurs de pierre
En 1889, nous le retrouvons à Epernon, dans l'Eure et Loir, où, le 3 septembre 1890, il reconnaît un petit Jean-François, né de lui et d'une certaine Marie-Yvonne (dite Yvonne) GALOPIN, une lingère alors âgée de 23 ans.
La jeune maman a déjà un passé tumultueux… Ayant quitté le domicile familial des Côtes d'Armor à l'âge de 16 ans, elle est partie à Paris, vivre d'expédients, et a été condamnée à plusieurs reprises pour complicité de vol et prostitution. 
Grâce à un registre d'écrou, je sais qu'Yvonne mesure 1m57, qu'elle a le menton large, les cheveux châtains, les yeux pâles, le teint ordinaire, et qu'elle a une verrue sur l'aile du nez.
La naissance du petit Jean-François pourrait être le point de départ d'une nouvelle vie, malheureusement, le pauvre petit décède à l'âge de deux mois et demi …
La relation de Jean-Marie et Yvonne est malgré tout durable, puisqu'ils se marient le 6 mai 1891, à Epernon. Ils n'auront manifestement pas d'autres enfants.
Le 5 février 1892, Jean-Marie prend au collet un autre ouvrier, le pousse, le renverse à terre, lui donne un coup de poing sur la tête et lance une pioche sur ses jambes. Pour ces faits, Jean-Marie est condamné à cinquante francs d'amende avec sursis.
Néanmoins, il est précisé dans le jugement que les renseignements recueillis sur son compte ne sont pas défavorables, et que Jean-Marie manifeste du repentir.

Fin 1892, début 1893, le couple quitte Epernon pour rejoindre le département de naissance d'Yvonne, et ils s'installent à Paimpol.
22 PAIMPOL / Rue De L'Eglise / - Paimpol
Paimpol
C'est le 24 juillet 1893 que le point de non-retour est franchi, je vous laisse lire la relation du drame par le journaliste du Progrès des Côtes du Nord :
« Depuis assez longtemps déjà, la nommée GALOPIN, femme LE BOUX, entretenait des relations intimes avec le sieur ROCHUT. Ces relations, LE BOUX feignait de les ignorer, au regard des sommes d'argent que sa femme recevait des mains de ROCHUT.
Cela ne l'empêchait pas, d'ailleurs, d'être fort brutal vis-à vis de sa femme qui se plaignait beaucoup des mauvais traitements dont elle était l'objet ; si bien qu'au mois de juillet 1893, elle manifesta l'intention de plaider en séparation. Elle fit même, à cette intention, en compagnie de ROCHUT, un voyage à Saint Brieuc où elle vint consulter un homme de loi.
Ce projet n'eut aucune suite. Les deux époux se réconcilièrent et résolurent d'attirer ROCHUT dans un guet-apens, afin d'obtenir de lui une forte somme d'argent, sous la menace d'un assassinat.
Le 24 juillet 1893, à six heures du matin, LE BOUX simula un départ pour Saint Brieuc et prit la voiture publique ; il descendit à Plouërec et se rendit au village de Saint Loup, où habite sa belle-mère. La femme LE BOUX annonçait à ROCHUT le départ de son mari et l'engageait à venir passer la soirée chez elle.
En quittant ROCHUT, elle acheta de la charcuterie à la femme GERARD pour donner à souper à son mari qu'elle attendait, disait-elle, dans la soirée. Elle rentrait chez elle vers 9 heures du soir, où, peu après, ROCHUT venait la rejoindre. Il était à peine entré que LE BOUX, caché dans une pièce voisine, se précipita dans la chambre tenant un revolver dans la main droite et un papier dans la main gauche. Puis, mettant ROCHUT en joue, il le somma de ne pas bouger, menaçant de lui brûler la cervelle.
Il ajouta aussitôt qu'il ne lui serait fait aucun mal s'il voulait signer le papier qu'il lui présentait. En même temps, LE BOUX ordonnait à sa femme d'apporter sur la table une plume et de l'encre.
ROCHUT, tout en demandant grâce, s'approcha et reconnut qu'il s'agissait d'un billet rédigé par la femme LE BOUX et le constituant débiteur de cinq mille francs. Il protesta, disant qu'il ne signerait pas, parce qu'il lui serait impossible de payer une somme aussi importante. LE BOUX répéta que s'il ne signait pas, il allait le tuer ; mais, ROCHUT résistant toujours, il fit feu tandis que son adversaire se trouvait à moins de deux mètres de distance, acculé dans un angle, entre le lit et la fenêtre ; il déchargea sur lui son revolver : les six balles portèrent. ROCHUT les reçut toutes au côté gauche : l'une aux bas des reins, l'autre dans le flanc, une troisième au poignet, une quatrième dans l'avant-bras, enfin les deux autres traversèrent la chemise sans l'atteindre.
ROCHUT voulant fuir, se précipita sur la fenêtre et s'efforça d'ouvrir les volets. Mais LE BOUX se jeta sur lui et, le saisissant, la ramena au milieu de l'appartement. Il l'ajusta avec un second revolver (que ROCHUT avait apporté et dont il s'était emparé sur les indications de sa femme) et le menaça de l'achever s'il ne signait pas.
Le malheureux, couvert de sang et terrorisé, obéit ; on lui permit alors de se retirer. »

Le procès d'Assises se déroule le 19 janvier 1894, à Saint Brieuc.

Cpa-22-saint Brieuc- Tribunal Jardin Public-animée-edi :vasselier N°2359 - Saint-Brieuc
Tribunal de Saint Brieuc vu du Jardin Public
Yvonne y est décrite comme « un vrai moulin à paroles ». Elle a déjà eu l'occasion de s'illustrer dans l'enceinte de cette Cour d'Assises, s'étant empressée de faire part au juge d'instruction des confidences d'une co-détenue concernant une autre affaire.
Les deux époux se défendent comme ils peuvent ; selon leur version des faits, Jean-Marie est revenu à l'improviste et a eu une réaction violente bien naturelle en trouvant Eugène ROCHUT en compagnie d'Yvonne. De plus, Jean-Marie n'a tiré les six coups de revolver que parce que ROCHUT s'était jeté sur lui pour le désarmer.
Jean-Marie et surtout Yvonne protestent vigoureusement à chaque déposition et interrompent fréquemment les témoins.
Cette défense acharnée n'est pas sans succès, puisque la tentative d'homicide n'est finalement pas retenue par les jurés. En revanche, l'extorsion de signature, même accompagnée de circonstances atténuantes, vaut à chacun des accusés dix ans de prison !
Reprenons le récit du journaliste du Progrès des Côtes du Nord :
« En entendant sa condamnation, la femme LE BOUX se met à sangloter et à pousser des cris déchirants ; elle se tord les bras, et au moment où les gendarmes l'emmènent, la malheureuse se jette dans les bras de sa mère toute en larmes.
Dans le public, que cette scène impressionne, on trouve généralement un peu forte la peine qui vient d'être infligée aux deux coupables ».

Jean-Marie est écroué le 27 janvier 1894 à la Maison Centrale de Thouars, dans les Deux-Sèvres.

16D - 79 - Thouars - Deux Sèvres - Entrée De La Maison Centrale De Force - Thouars
Maison Centrale de Thouars
Par décision du 17 avril 1894, la peine d'Yvonne est réduite de moitié, et par décision du 1er juillet 1896, Yvonne est libérée sous condition.
Yvonne s'installe près de Poitiers pour se rapprocher de Jean-Marie. Le compte-rendu d'un jugement ultérieur nous apprendra qu'elle n'y mène pas une existence sans reproches ...

Le 11 janvier 1899, Jean-Marie est libéré sous condition. Il retrouve Yvonne et tous deux vont s'installer dans le Morbihan, à Malestroit, puis à Monteneuf à partir de mai 1899.

En 1900, nous retrouvons le couple à Rennes, au 16 rue du Chapitre.

RENNES - Vieille Maison, Rue Du Chapitre - Café : Chevalier Sert à Boire Et à Manger - Blanchard Menuisier - Animé - TBE - Rennes
Rue du Chapitre à Rennes
Yvonne ne va pas tarder à faire des siennes, prenant ouvertement un amant et injuriant publiquement son mari.
A cette époque, Jean-Marie doit subir une intervention chirurgicale, et se retrouve hospitalisé pendant quelques temps. C'est alors qu'Yvonne en profite pour envoyer un pauvre homme, sans doute appâté par ses charmes, au guichet de la Caisse d'Epargne se faire passer pour Jean-Marie et retirer 400 francs placés par ce dernier ...  La seule récompense de ce monsieur trop crédule fut un verre payé par Yvonne sur le zinc d'un quelconque estaminet.
C'en est trop pour Jean-Marie qui se résout à rompre les liens entre lui et Yvonne ; il porte plainte et demande le divorce.

Le 5 avril 1901, la Cour d'Assises de Rennes condamne Yvonne à deux ans de prison et cent francs d'amende pour complicité de faux avec circonstances atténuantes.

Jean-Marie est alors domicilié rue de Saint Malo, au n° 104 puis au n° 69. Débarrassé de son mauvais ange, il s'emploie à retrouver une vie normale.
En 1903, pendant six mois, Jean-Marie travaille à Saint Malo, chez messieurs TURBIN frères, entrepreneurs. Il est alors en pension chez M.LEBAIL, aubergiste, 14 rue du Point du Jour.

Le 17 juin 1903, le divorce est prononcé entre les deux époux, aux torts d'Yvonne bien évidemment.

Quel sera l'avenir d'Yvonne ? Sombre … et bien documenté par les gazettes, vous allez le voir !
Nous la retrouvons le 10 septembre 1904 à Epernay dans la Marne où elle épouse un veuf de quarante-huit ans, dénommé Antoine RICHARD. Mariage assez bref, puisque le divorce est prononcé le 18 octobre 1907. Elle contracte un troisième mariage avant 1912 avec un certain Elie DELACOUR.
Sa vie matrimoniale bien remplie est entrecoupée de séjours en prison, essentiellement en raison de larcins. Son nom apparaît régulièrement dans les comptes-rendus des audiences correctionnelles de tous les Tribunaux de l'Ouest ! Quelques exemples au hasard :
- condamnée à six mois de prison en avril 1914 à Rennes pour vol de 20 francs 50 et d'un jupon
- condamnée à deux ans de prison en janvier 1917 à Rennes pour vol de linge
- condamnée à quinze mois de prison en octobre 1923 au Mans pour vol d'une valise dans le hall de la gare
- condamnée à deux ans de prison en mars 1928 à Vannes pour vol de 420 francs.
- condamnée à six mois de prison en juin 1931 à Saint Brieuc pour vol
- condamnée à deux mois de prison en novembre 1936 à Rennes pour vol
Entre autres exploits, Yvonne se fait passer pour la chaisière du célèbre Parc du Thabor à Rennes, et encaisse indûment la location des chaises auprès des promeneurs !
Je ne résiste pas au plaisir de vous livrer un petit entrefilet choisi parmi beaucoup d'autres :

https://pv5web.retronews.fr/api/document/77/139433/page/9/crop-rect/24.00/51.00/320.00/353.00
Extrait de l'Ouest-Eclair du 1er novembre 1936, avec erreur de prénom, mais il s'agit bien d'Yvonne.
Bref, en 1936, alors qu'elle est âgée de 69 ans, Yvonne totalise 30 condamnations, assorties de pas moins de 140 années d'interdiction de séjour dans différentes villes, interdictions qu'elle ne respecte bien évidemment pas.
Elle décédera en décembre 1939 à Dinan.

Il n'y a donc pas eu de rédemption pour Yvonne, au contraire de Jean-Marie sur qui les années de privation de liberté ont eu l'effet attendu.

Empêché par son  état de santé de poursuivre son pénible métier, Jean-Marie devient marchand forain. Il loge désormais au 33 rue Paul Féval à Rennes.

Le 5 février 1906, Jean-Marie demande sa réhabilitation par le courrier suivant que je vous retranscris intégralement, fautes d'orthographe incluses, car elles prouvent que Jean-Marie a rédigé seul son courrier et donc que ces lignes constituent l'expression touchante de sa personnalité :
" Monsieur le Procureur de la République,
 Je prend la respectueuse liberté de vous faire parvenire ces quelleques lignes pour vous priez davoir la bonté de maccordée ma réhabilitation. Jai été condamnée par les assises des Cotes du Nord pour extortion de signature a 10 ans de réclusion a la date du 19 Janvier 1894, peine subie à Thouars (Deux-Sèvres) et rendu en liberté conditionnelle le 11 Janvier 1899. Jai abité Monteneuf (Morbihan) pendant 18 mois jusqueaux 14 Juillet 1900 date que je sui venue a Rennes. Jai abité rue Saint Malo n° 104 et rue Paul-Féval 33. Jai du quiter mon métier de tailleur de pierre a la suite dune opération et actuellement je sui marchand forain. 
Soyez donc assez bon Monsieur le Procureur de la République de me faire accorder cette faveur afin que je soit aux même droit que tous les citoyens. Les frais on été payés.
Dans latente que vous voudrez bien prendre ma demande en considération,
Daigner agréer Monsieur le Procureur de la République mes sentiments respectueux donc je vous serai très obliger."

Le 3 mai 1906, la Cour d'Appel de Rennes prononce la réhabilitation tant attendue.

Ayant récupéré ses droits, Jean-Marie peut désormais envisager un avenir heureux. D'ailleurs, sur les marchés où il travaille, il a remarqué une jolie marchande de blouses, de dix ans sa cadette, toujours souriante et gaie malgré les épreuves qui n'ont pas manqué pour elle non plus : mon arrière-grand-mère Jeanne Marie CATHO.

Après leur mariage, elle et ses deux fils vont s'installer au 33 rue Paul Féval. C'est donc là que Jean-Marie décèdera cinq ans plus tard, laissant derrière lui une petite fille de 4 ans, Jeanne.

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes debout et intérieur
Jeanne LE BOUX et Emile BUREL, le 16 avril 1932
Jeanne ne vivra que vingt-cinq années, vaincue par la tuberculose, laissant à son tour une petite fille de deux ans, Jacqueline.
Jacqueline ayant eu trois enfants, eux-mêmes désormais parents et grands-parents, c'est grâce à elle que la descendance de Jean-Marie sera finalement florissante !












vendredi 22 février 2019

Julien GUEHO, le père inconnu




 


Mon grand-père, André Julien Marie CATHO, est né avec le siècle, le 2 janvier 1900, à Rennes (Ille et Vilaine), de père inconnu, ainsi que son frère Georges, cinq ans plus tard.
Ce n'est qu'en 1968, trois semaines avant son décès, qu'il a donné à sa fille (ma mère) certains éléments.

Originaire de Vannes, sa mère, Jeanne Marie CATHO, avait eu ses deux garçons avec le même homme, un entrepreneur en maçonnerie du Morbihan.

Jeanne Marie CATHO à 22 ans en 1894

Faute de nom ou d'autres informations, je m'étais résignée à laisser vierge un quart de mon arbre généalogique.

Et puis, en lisant des articles de généalogie à droite et à gauche, j'ai appris que fouiller du côté des témoins de l'acte de naissance pouvait donner une piste.
J'ai donc repris l'acte de naissance de mon grand-père André Julien Marie CATHO, et je me suis aperçue que le premier témoin s'appelait Julien GUEHO (tiens, le même prénom que mon grand-père), qu'il était domicilié 9 rue de Brest, comme la mère de l'enfant (une rapide recherche m'apprend que c'est un immeuble, donc il pouvait simplement s'agir d'un voisin compatissant ...ou plus !), et surtout, qu'il était maçon !
Pas de certitude absolue, mais beaucoup de points communs tout de même ...
La rue de Brest, à Rennes, vers 1900
De plus, en cherchant du côté de Jeanne Marie CATHO, je trouve l'acte de mariage de son frère à elle, à Vannes en 1893, et devinez qui est témoin ? Le même Julien GUEHO ! L'âge correspond, il est entrepreneur ...
J'échafaude aussitôt des hypothèses romanesques : le témoin et la soeur du marié se plaisent, il a 36 ans, elle en a 21, après quelques années à lutter contre leur attirance mutuelle, ils ont fui à Rennes cacher leur liaison ... Etait-il marié ?
L'Hôtel de Ville de Vannes vers 1893
Me voilà donc partie sur les traces de tous les Julien GUEHO du Morbihan, nés vers 1857, et ils sont nombreux ... Mais un seul est maçon : celui né à Sérent le 15 février 1857, et marié le 22 juin 1881 à Vannes avec Marie-Françoise PEDRON.
Je sais donc qu'il était marié depuis presque vingt ans quand mon grand-père est né, ce qui explique qu'il ne l'ait pas reconnu.

Désireuse d'en apprendre plus, je pense trouver la fiche matricule de Julien GUEHO en un rien de temps, sauf que … même en élargissant un peu les dates, pas de trace de mon Julien GUEHO dans les registres matricules du Morbihan, pas plus que dans ceux du Finistère, des Côtes d'Armor, de l'Ille et Vilaine, de la Loire-Atlantique, de Paris ...
Julien étant maçon, peut-être a-t-il dû effectuer un Tour de France pour apprendre son métier, auquel cas, à ses vingt ans, il a pu être recensé dans n'importe quel département français … 


En parallèle, je renoue avec une petite-fille de Georges CATHO, l'autre fils de Julien GUEHO ; ma cousine Patricia possède d'autres détails sur cette liaison, les voici :
Le couple Julien et Jeanne Marie est parti s'installer à Rennes quand Jeanne Marie s'est aperçue qu'elle était enceinte, donc au cours de l'année 1899. Ils se sont séparés après la naissance de Georges, lequel n'avait pas de souvenirs de son père. En revanche, mon grand-père André s'en souvenait ; c'est d'ailleurs pourquoi, quand sa mère s'est mariée avec un autre homme, il a refusé d'être reconnu par celui-ci.

Quelque temps après la séparation, Jeanne Marie est tombée sérieusement malade, et a dû être hospitalisée. Alors, Julien est revenu chercher ses fils et les a emmenés dans le Morbihan, pour que sa femme légitime, avec laquelle il n'avait pas pu avoir de descendance, s'en occupe.
Redoutant de perdre ses enfants, Jeanne Marie, bien qu'encore souffrante, quitte précipitamment l'hôpital, prend un train pour le Morbihan et va récupérer André et Georges au foyer de son amant et de la femme de celui-ci …
Résultat de recherche d'images pour "vannes gare 1900"
La gare de Vannes vers 1900
Après cet épisode pénible, il semble bien que les enfants n'aient plus revu leur père.
Jeanne Marie se marie d'ailleurs en 1909, avec Jean-Marie LE BOUX, lui-même enfant naturel, dont je vous reparlerai dans « Le mystérieux Monsieur LE BOUX ».

Que deviennent Julien et sa femme, la conciliante Marie-Françoise ? A ce jour, je n'ai pas retrouvé le décès de Marie-Françoise, mais voici la triste fin de Julien GUEHO en juillet 1919 à Muzillac :



Le visage de l'insaisissable Julien GUEHO sera-t-il un jour connu de ses descendants ? Peut-être, mais le chemin sera tortueux.
Il me faut pour cela le retrouver dans les recensements de Vannes et de Rennes, ainsi que dans les autres communes où il a pu travailler et qui me sont inconnues pour le moment. Je connaîtrai ainsi ses employeurs de la période où il était salarié comme maçon.
Sachant qu'il était habituel à l'époque que les patrons se fassent photographier devant leur entreprise avec leurs employés au grand complet, il est possible que je mette la main sur une photo où figure mon arrière-grand-père.
D'ailleurs, son beau-père Jean-Marie PEDRON étant maçon dans le quartier de Bohalgo à Vannes, il est très possible que Julien ait travaillé avec lui.
Parallèlement, je vais chercher les descendants de la sœur de Julien, Michelle GUEHO, et les descendants du frère et de la sœur de Marie-Françoise, Joachim PEDRON et Jeanne PEDRON épouse LE FILLEUL.
Peut-être ceux-ci ont-ils conservé des photos de groupe où serait présent Julien GUEHO ? Il faut savoir que le dit Julien avait une véritable vocation de témoin ! Il figure en tant que tel sur nombre d'actes de naissance, mariage et décès de son entourage familial et de celui de sa femme.
Ce fait vient nuancer et enrichir le portrait moral de Julien : être choisi aussi souvent comme témoin par des personnes différentes accrédite l'idée d'un homme fiable, sympathique et disponible.
Si j'arrive à obtenir plusieurs photos, je pourrai peut-être identifier Julien par recoupements, éventuellement aidée de la description physique présente sur sa fiche matricule que je continue à chercher dans d'autres départements.
 
Cerise sur le gâteau quelques mois après avoir fait toutes ces découvertes : via un test ADN, j'ai remonté l'ascendance d'un cousin génétique apparaissant dans mes correspondances, et ... ses ancêtres sont les mêmes que ceux de Julien GUEHO ! CQFD ...

En conclusion, il ne faut jamais désespérer, surtout en généalogie. Dans certaines situations, un père inconnu peut être identifié, il suffit d'avoir un premier fil à tirer pour dévider une bonne partie de la pelote. Si un tel cas se présente à vous : interrogez, prenez conseil, réfléchissez, écumez les archives …
J'en profite d'ailleurs pour remercier à nouveau tous ceux qui m'ont aidée dans cette quête, et tous ceux qui m'aideront encore. D'ailleurs, si vous avez une suggestion de nouvelles pistes de recherches, faites m'en part, un œil neuf est souvent plus affûté !